Une expérience thérapeutique

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Spécificité du Centre Pierre Cazenave

Pourquoi avoir créé ce lieu d’accueil thérapeutique ?

Le cancer, par la gravité et le caractère angoissant de l’atteinte qu’il représente, est une maladie qui affecte le sujet dans tout son être et peut provoquer de profonds bouleversements physiques, mais aussi psychiques et existentiels.

Pour chaque malade, il paraît vital de prendre en compte la dimension psychique de sa maladie, non seulement pour l’aider à faire face aux multiples traumatismes qui en marquent l’évolution, mais aussi pour soutenir les forces créatrices qui, à l’occasion de cette atteinte au risque mortel, peuvent se faire jour.
En effet, cette épreuve peut aussi susciter des énergies nouvelles, ouvrir des perspectives inédites. Mais ce mouvement, pour s’affirmer, doit être reconnu et accompagné par d’autres qui sont ainsi parties prenantes du trajet que le malade peut accomplir à l’occasion de sa maladie. Ce Centre a donc été créé pour répondre aux besoins psychiques spécifiques de qui est confronté à la maladie, malades et proches.

Un lieu thérapeutique innovant

Plus de vingt ans d’expérience – le Centre a été créé en 1998 – nous ont confirmé le bien-fondé de l’approche clinique qui a présidé à la conception de ce Centre.
Son originalité a résidé dans l’étroite collaboration entre psychanalystes et malades accueillants, la psychanalyse constituant la référence commune de leur pratique.

  • La rencontre avec le psychanalyste peut être pour le malade un évènement psychique décisif. En effet, sa pratique du transfert permet à l’analyste non seulement d’accueillir dans l’urgence la détresse traumatique du malade, ce qui lui apporte d’emblée un soutien essentiel, mais aussi de rejoindre le patient au plus près d’une détresse infantile jamais reconnue que réactualise souvent la maladie, et dont l’accès thérapeutique peut être à l’origine de remaniements psychiques salutaires, voire d’une véritable renaissance. 
  • La présence des accueillant(e)s participe de façon primordiale à la qualité thérapeutique de cette structure. Leur double expérience de la maladie et d’une thérapie analytique leur permet d’offrir aux malades et aux proches une qualité d’accompagnement qui tient pleinement compte de la subjectivité de chacun. Ces accueillant(e)s contribuent à créer dans le groupe d’accueil un espace à la fois protecteur et ludique qui, face aux attaques destructrices de la maladie, est un lieu riche d’interactions vivantes et porteur d’espoir. 

Conçu en rapport avec notre approche clinique du trauma lié à la maladie, et aux aléas des liens précoces, ce lieu a fonctionné comme espace transitionnel au sens de Winnicott, donnant à chacun la liberté d’inventer son trajet singulier au fil des rencontres avec les accueillant(e)s, les psychanalystes, les autres consultants, et, plus récemment les responsables d’ateliers. (Francoise Bessis - Malades et thérapeutes partenaires face à la maladie)

L’introduction d’ateliers créatifs dans ce Centre répondait à un impératif thérapeutique : dans ce processus de mutation et de reconstruction subjectives où le patient peut être engagé à l’occasion de sa maladie, ces ateliers lui offraient la possibilité de réhabiter son propre corps et de trouver de nouveaux objets à investir.

Concrètement le Centre a proposé :

Pour les malades et les proches :

  • des permanences d’accueil hebdomadaires animées par un psychanalyste et deux accueillant(e)s où l’on pouvait venir avec ou sans rendez-vous, et où se rencontraient anciens et nouveaux consultants.
  • des entretiens individuels avec le psychanalyste dont le caractère thérapeutique n’impliquait pas nécessairement un engagement analytique au long cours.

Pour les malades :

  • Un groupe de parole, spécifiquement destiné à de jeunes adultes confrontés au cancer, animé par un psychanalyste et deux accueillants.
  • Des ateliers : cuisine, Qi Gong, dessin et écriture.

Une structure associative

C’est le soutien de cette structure associative, Psychisme et Cancer, qui a permis au Centre Pierre Cazenave d’exister en marge de l’institution hospitalière ; cela constituait un atout précieux pour le malade, lui permettant de sortir de la passivité à laquelle peuvent le contraindre la maladie et les traitements, et de retrouver ainsi toute sa compétence et son dynamisme.

L’Association a mis en œuvre un partenariat élargi entre malades, professionnels du soin et institutions de santé, riche d’apports mutuels, et qui constituait déjà l’idée directrice des fondateurs de l’Association en 1991 – une malade, Brigitte Benoît-Latour, et ses deux thérapeutes : un pneumo-cancérologue le docteur Pierre Baldeyrou, et un psychanalyste, le docteur Pierre Cazenave, lui-même atteint de cancer.

La vie associative a une fonction de lien social et permet à chacun de participer à une œuvre commune en fonction de ses besoins, de ses capacités, de ses désirs.
L’indépendance de cette association, l’originalité de ce Centre, ont aussi contribué à leur vulnérabilité.

Pour poursuivre leur action, les cadres de l’association comme les acteurs du Centre thérapeutique ont eu un besoin vital de tous ceux – professionnels, malades, proches ou autres – qui se sentaient solidaires de cette démarche. Pour permettre à une telle structure d’exister de façon pérenne, il est essentiel, à la fois de la faire connaître pour que ceux qui peuvent en bénéficier puissent y accéder, et de soutenir à l’intérieur une dynamique de travail respectant les compétences propres de chacun.

Dans cette perspective, Le Livre de Pierre. Psychisme et cancer (Éditions du Seuil), écrit en 1994 par Louise L. Lambrichs à partir d’entretiens avec Pierre Cazenave, n’a cessé d’être une source d’élaboration et de réconfort pour les malades, une rencontre décisive pouvant les amener à exprimer une demande d’aide, en particulier au Centre (réédition augmentée en mars 2011), mais pas seulement.

Par ailleurs, deux colloques ont été organisés : 

  •  l’un en 2004 : « Cancer, trauma, soin, créativité ». Les actes du colloque ont été publiés dans la revue Le Coq-Héron, n°180 (Éditions Erès, 2005). En savoir plus
  •  l’autre en 2014 :« Cancer et trauma : travail, soin et créativité ». En savoir plus

Un lieu de recherche et d’échanges entre soignants

L’activité permanente de recherche clinique est le garant essentiel de la qualité de l’action thérapeutique dans une telle structure. Elle permet d’approfondir la spécificité de l’aide psychique qu’un tel lieu d’accueil et notre pratique d’analyste apportent au malade par rapport aux autres aides qui lui sont proposées.
Toutes ces années de pratique au Centre nous ont montré que nos réflexions, l’expérience issue de notre écoute des malades, peuvent être d’un apport fécond pour les différents soignants impliqués dans leur prise en charge : cancérologues, généralistes ou spécialistes, infirmiers, psychanalystes, psychologues, psychiatres et thérapeutes divers.

Nous avons ainsi été engagés avec ces différents professionnels dans un travail de collaboration et de formation dans des contextes divers.

Concrètement, le Centre a proposé aux soignants :

  • Un accueil individuel d’information ou d’orientation pour les praticiens ou les étudiants.
  • Des stages dans nos permanences d’accueil pour les étudiants de l’enseignement supérieur.
  • Un séminaire d’échanges cliniques animé par deux psychanalystes et destiné à des thérapeutes travaillant avec l’outil analytique.
  • Un groupe de lecture associant littérature et psychanalyse.

En dehors du Centre, les membres de l’équipe ont pu assurer :

  • Des groupes de parole pour les infirmières en cancérologie.
  • Des supervisions d’équipes médico-sociales ou paramédicales, confrontées à la maladie grave, dans la perspective de la prévention du risque psycho-social.
  • Des interventions dans des sessions de formation pour cancérologues.
  • Des interventions ponctuelles dans des services hospitaliers et dans des cliniques privées.
  • Des interventions dans des associations en rapport avec le cancer et/ou avec la psychanalyse.
  • Des communications dans des colloques scientifiques.