Une expérience thérapeutique

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Maryse Raynal – Mon expérience avec mon cancer – 2020

Lorsque le médecin me confirme que je suis atteinte d’un cancer du sein et qu’il faudra rapidement effectuer une mastectomie, je ressens un vague étourdissement mais aucune panique, pas de peur, je suis juste sidérée, mon corps et ma tête sont comme paralysés. Sur le chemin du retour, j’ai eu soudainement la sensation intense d’exister, qu’il m’arrivait enfin quelque chose de grand, quelque chose qui m’appartenait, qui était à moi seule. J’étais habitée par le cancer et celui-ci provoquait en moi la sensation intense de vivre.

Au cours des jours et semaines suivantes, cette exaltation fait place à une sensation de vide abyssale, un vertige de vide, un trou noir dans lequel j’avais l’impression de me perdre. Je ne savais plus où j’en étais. La vie, la mort, je ne savais pas ce qui était en moi. Je m’accrochais au fait que j’abritais un cancer que j’avais fait mien, mon cancer, qui m’avait offert une telle sensation d’existence comme une ivresse. Je n’avais pas envie de le quitter et j’avais l’impression que ma tête allait éclater d’émotions.

Un des médecins à qui j’exprimais ces idées et sentiments confus et instables, m’a fortement conseillé de rencontrer un(e) analyste qui pourrait m’aider à comprendre ce qui se passait et m’accompagner, ce que je fis. Si je souhaitais absolument vivre mon cancer jusqu’à la fin et en mourir, je voulais comprendre pourquoi et clarifier ce tumulte de sensations et de sentiments en moi. Je me disais que j’avais eu une vie bien pleine et dans le lot, des bonheurs intenses et des souffrances blessantes. Je pouvais en finir là, la boucle pouvait se refermer et cette perception m’enveloppait d’un grand calme.

Ce parcours que je continue encore m’a révélé mon mal, une vie que je ne sentais pas, et m’a conduite vers une naissance que j’apprends encore à ressentir, à découvrir. Lors de moments de fatigue profonde, d’épuisement total qui m’ôtaient tout désir, toute envie, passant les journées au lit, je trouvais tout de même l’énergie suffisante pour rencontrer mon analyste, j’en avais un besoin vital. Je trouvais chez elle empathie, encouragements, un socle ferme et accueillant, un regard vrai, sans concession mais bienveillant, des silences lourds et douloureux mais qui me poussaient à aller plus profond comme si ma main cherchait désespérément à accrocher quelque chose de vivant.

J’ai aussi pratiqué le Qi-Gong, Il m’apportait confort et calme. Je retrouvais aussi mon corps que j’avais du mal à sentir. Je repartais apaisée, et même parfois joyeuse, avec souvent une sensation de légèreté.

Ce cancer, mon cancer, a été le révélateur de ma vie et a tenu peut-être le rôle de géniteur ! En tous les cas, il a été salvateur et m’a fait sentir le vivant qui était en moi.

Je suis, aujourd’hui, en rémission d’un cancer du sein métastasé.